11 Aout 2007
Ma premiere semaine au CHM est terminée. Voici mes premieres impressions (les sages-femmes apprecieront, desolée pour les autres.)
Premier Jour en Gynecologie : C'est le service des cesariennes et de tout ce qui est gyneco. C'est Anne-Sophie ma chef, 4 ans de service a Mayotte.
J'arrive surmotivée, j'ai envie de prendre un bon depart, d'essayer de tout comprendre du premier coup, de tout retenir...Debile! J'avais deja oublié, on est a Mayotte! No stress ! Surtout rester cool, ne pas se prendre la tete. On commence par un petit café (et surtout une clope pour tout le monde. Je suis impressionnée par la consommation de tabac a Mayotte. Tout le monde fume, et beaucoup !!! Il parait que les clopes sont données ici mais est-ce une explication suffisante ou le temoin d'autre chose ? Affaire a suivre). Le café se prend sur la terrasse au fond du couloir du service de "grossesses path". Quelques palmiers en pots, vue sur mer. Le coin est plutot agreable, l'impression d'etre en vacances decidement ne me lachera pas, meme en blouse blanche !!
Ce qui me frappe cette premiere journée c'est une impression de laisser aller general, une sorte de flou artistique dans l'organisation du service, qui me change du CHU de Clermont.Il faut dire que les transmissions ont été plus qu'approximatives, ...ou peut-etre est ce moi qui n'ai pas tout compris malgres mes bonnes resolutions du matin....On verra ca plus tard.
Desolée pour les ames sensibles, seuls les pros apprecieront, je vois mes premiers abscés du seins (tres frequent a Mayotte), pas joli-joli.
Les chambres sont de trois lits, climatisées (un peu trop a mon avis, je passe mon temps a couvrir tout ces bébés avec les petits bouts de tissus que les mamans me donnent). Les chambres etaient prevues pour deux lits au depart, mais afflux de clandestins oblige, il a fallut repenser l'organisation du service. Ici, on ouvre des lits quand on les ferme en metropole.
Deuxieme journée en grossesse patho. C'est Mathilde (sur le depart) qui me sert de coach ! J'assiste au staff du docteur Harmas. On y presente certains dossiers necessitant une CAT (conduite a tenir.) Dans le service, une patiente hyperalgique hospitalisée pour une crise drepanocytaire, des Map (menaces d'accouchement prematurée), thrombopenie, HTA....Je baraguine quelques mots shimahoré. Ca fait rire les bouenis mais le plus souvent je n'ai aucune reponses. Des progres a faire !!! Et puis, il faut que je m'habitue car ici pas de reponse ou un petit "hm-hm" signifie 'non'. Sachant que "hmm-hmm" peut vouloir dire oui, il faut en saisir toute la subtilité !!! Ca viendra....
C'est amusant, ca les touche on dirait de voir une mzungou comme moi galerer, ca nous rapproche en quelque sorte! Quand je les croise dans le service, elles sont tout sourire, me disent quelques mots faciles, ou rigolent en se cachant le visage dans les mains ou dans le salouva. Les mahorais sont timides. Peut-etre sont-ils impressionnés par les blancs, je ne sais pas encore.
Mercredi, je vais en M8 avec Laureline. C'est la zone de Tri. C'est ici qu'arrivent toutes les urgences pour etre dispachées dans les differents services.
Deux femmes sont montées sur des chaises en courant parce qu'elles sont a dilatation complete, c'est sportif comme secteur !!!
Quand c'est moins urgent, c'est la qu'on fait tous les papiers des entrantes.
Une femme arrive de Mtzamboro pour anomalie de rythme. Je n'avais jamais vu un RCF aussi sinusoidal et cela depuis plus de deux heures (dont une heure de transfert.) Elle a été cesarisée direct, je ne pense pas que quelqu'un lui ai expliqué quoique ce soit.Elle s'est retrouvée au bloc sans rien comprendre de ce qui lui arrivait. L'enfant s'en est sorti, mais c'etait moins une. Du traumatisme de la mere, je ne sais rien.
Encore une qui fera tout pour ne pas revenir a Mamoudzou !! Pourtant a partir de maintenant elle devra toujours accoucher au CHM. Antecedent de cesarienne = accouchement a Mamoudzou, seul hopital de l'ile qui possede un bloc operatoire où l'on peut pratiquer une cesarienne. Pour ces grossesses futures, elle fera peut-etre comme certaines qui ne viennent pas a leur consultations a Mamoudzou de peur d'etre cesarisées et trainent dans la nature avec leur uterus cicatriciel, jusqu'a des termes depassés. Elle finissent par arriver dans les dispensaires de brousse en travail, si ce n'est a dilatation complete. Ce qui fait evidemment le bonheur de la sage femme de garde!!!
Parfois, quand elle depassent vraiment leur terme, ou qu'elles ne se sont pas presentées a leurs rendez-vous, l'hopital utilise RFO, pour faire un appel radio aux femmes, leur demandant de venir consulter rapidement! Et c'est tout le village qui profite de l'info !
Jeudi, premiere garde en salle d'accouchement. J'attaque avec une equipe de choc, des filles tres sympas. Anne laure, Amelie et Juliette sont de garde, je suis un "plus".
J'ai une femme en travail, declenchement pour terme depassé. Une primipare que je laisserai a 8 cm.Elle douille la pauvre, et moi je n'ai pas vraiment les mots rassurants qui pourait l'aider...c'est frustrant...mais j'apprends, je n'ai pas envie d'avoir a faire appel a un traducteur ( c'est a dire l'aide soignant) a chaque fois. Le deroulement du travail est proche de ce que je connais de Clermont, declenchement par gel puis synto-rupture. Le nubain remplace la peridurale, on fait avec ce qu'on a. Sa coco (son accompagnante) n'est pas d'un grand secours. Elle s'est couché par terre dans le box, et roupille a meme le sol. Je suis toujours a deux doigts de lui marcher dessus quand je dois contourner le lit, mais ca ne l'empeche pas de dormir !!!
La jeune fille dans le box d'a coté vient pour une fausse-couche tardive.Elle est a 18 semaines. Elle a treize ans. Tu voulais la grossesse ? "Ewa". Treize ans et elle pleure cette premiere grossesse. Elle souffre, elle se demande ce qui lui arrive. Dur passage dans le monde des adultes, elle qui a tout d'une enfant, toute fine, a peine une ado. Comment son uterus aurait-il pu garder cet embryon trop gros pour lui? Dans son ventre meme, il n'y avais pas la place d'un enfant. Cette petite a pu avoir la peridurale, exceptionnellement.
Bénéfice de l'age.
Enfin vendredi, dernier jour de la semaine, en suites de couches avec Harouna, sage-femme mahoraise. Avec elle, j'apprends plein de mots. Ca rigole bien dans les chambres !! Le service est plein, 17 lits environ mais uniquement des accouchements par voie basse, alors ca va vite. J'aime beaucoup cette matinée, je commence a avoir quelques mini dialogues avec les bouenis, et beaucoup de sourires en echange de mes efforts.
Les apres midi de la semaines, en vrac...Apres le boulot...
Decouverte du parc de la pointe Mahabou avec Sophie. C'est a deux pas de chez nous. C'est le parc montjuzet d'ici. Lui aussi posé sur une colline, traversé de petits chemins de terre empruntés par les joggers, parsemé de "farés" (abris en bois, ouverts sur l'exterieur où il fait bon se prelasser sur des bancs, manger sur les tables en bois, ou tout simplement profiter de la vue a l'abri du soleil). Il y a meme un parcours de santé. Face a la mer, Sophie et moi sortons nos bouquins, la soirée est superbe, les couleurs chaudes, la temperature ideale....On s' offre un bon moment de lecture et une belle promenade, vue sur mer, ca va de soit.
Jeudi direction Mtsangamouji, cote ouest, pour un "tamtam-zebu". Fete locale, petite "féria" tres populaire. Dommage, je m'etais trompée de jour !!! Aucune ambiance au village lorsqu'on arrive, mais une plage deserte, immense, comme dans un film en Normandie...C'est demain la fiesta ! C'est bete. Surtout que j'avais un peu proposé a plein de monde de venir....Anne Bourdel entre autre dont je viens de faire la connaissance, interne en medecine Gé, en stage a Mayotte, et petite soeur de ce cher Nicolas Bourdel, futur chef a la Polyclinique de Clermont, et un de mes cavaliers preférés lors des soirées de l'internat...
Vendredi apres midi, des la sortie de garde, je prends le taxi-brousse direction Mtsahara au nord. Bercée par une musique a consonnance africaine donc forcemment rythmée, je somnole durant l'heure de trajet (environ 40 km.). A Mtsahara, je demande Binti, du dispensaire de Mtzamboro....Ca marche tres bien, je trouve facilement sa belle maison rose grace aux indications des gens du village, heureux de pouvoir m'aider. Son accueil est tres chaleureux. Elle m'offre a boire et des cacahouettes qu'elle va chercher dans la boutique que tient son mari et qui jouxte la maison. Le mariage va bientot commencer. Je fais connaissance de toute sa famille, sa belle-mere, son pere, ses enfants et neveux...puis j'enfile un salouva avec ses filles, et je vais avec elle saluer la jeune mariée dans sa maison. Les cours en terre battues sont des cuisines de plein air ou d'enormes marmites fremissent sur des feux de bois, parfois des rechauds a gaz. Ca embaume l'air d'effluves epicées. La mariée, environ 17 ans, est dans sa chambre. D'autres jeunes filles lui font le henné sur les mains, la maquillent, la parent de bijoux. Les filles de Binti me fabriquent une "broche" de fleurs de jasmins et de bougainvilliers delicieusement parfumée qu'elles m'accrochent au salouva. Je suis prete pour aller au M'Biwi.
Sur la place du village, une "tente" a été dressée, des tapis posés en U autour d'un groupe de musique. Des groupes de femmes s'installent, avec les enfants assis entre leurs jambes, deux morceaux de bois dans les mains. La fete peut commencer. Les hommes aussi sont la, mais a distance, ils n'ont pas droit a l'ombre de la tente. La musique est mahoraise, l'assemblée feminine marque le rythme en tapant l'un contre l'autre les deux morceaux de bois.C'est ce qu'on appelle le "m'biwi" L'ambiance s'echauffe. Les femmes se levent deux par deux. Face a face, elles dansent quelques minutes devant tout le public une choregraphie identique, comme face a un miroir, ou les mouvements des fesses a quelque chose de dement. Je suis fascinée, comment font-elles ca ?! Ca pourrait ressembler a de la danse orientale mais en plus rythmée, comme mélangée a des danses d'afrique noire. Quel spectacle !!! Pas d'autres mzougous que moi, j'ai l'impression d'etre une privilégiée. A 18 heures, je reprends le taxi brousse dans l'autre sens...je regrette de ne pas pouvoir assister au repas, mais les taxis apres 18 heures, il n'y en a plus. Je suis invitée demain et dimanche a poursuivre la fete, le neveu de Binti me demande d'etre sa cavaliere...
Le soir, retour au "Barfly", pour une ambiance encore differente....Disco, années 80, un peu de house, un peu de latino et de zouk...je n'ai pas franchement progressé depuis la semaine derniere, mais je m'eclate ! Il fait une chaleur dingue dans cette petite boite, on surchauffe, on transpire, on manque de place et d'air, tout le monde est comme en transe. J'adore !! Sur la terrasse du bar face a la mer on souffle un peu. J'ai retrouvé des connaissances, Karine, l'infirmiere du pool, Armelle une sage-femme tres sympa, Thomas du dispensaire de mtzamboro, Arnaud, le copain de Fabienne, Laureline, Lucie, Laurent....je me sens comme a la maison, je me sens heureuse, bien entourée...
A deux heures, c'est la fermeture...
Au dodo, demain c'est plongée!!!
vendredi 10 août 2007
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